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La suspension: punir ou faire oeuvre d’éducation?

Par Égide Royer, Ph. D. psychologue

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Un certain nombre de jeunes n’abandonnent pas l’école : ils en sont exclus. On peut assez facilement établir le « portrait-robot » des élèves susceptibles d’être suspendus ou expulsés. 

Il s’agit habituellement de garçons dont l’âge moyen se situe entre 13 et 16 ans, venant fréquemment d’un milieu défavorisé et ayant connu un cheminement scolaire plus ou moins troublé. Les retards scolaires et les difficultés d’apprentissage sont fréquents dans leur parcours, tout comme les changements d’école. Leurs résultats scolaires sont moyens ou faibles et plusieurs présentent des problèmes d’absentéisme.

Les facteurs suivants, qui relèvent cette fois de l’école, influencent également les taux de suspension : formation limitée et faible tolérance des enseignants à l’égard des comportements des élèves, politique généralement punitive de l’école pour les questions disciplinaires, implication limitée des élèves et des parents dans l’élaboration de cette politique, faible cohésion de l’équipe éducative et leadership limité de la direction.

La suspension et l’expulsion ont un impact important sur la réussite de plusieurs jeunes. L’élève est souvent livré à lui-même et acquiert une réputation négative au sein de l’école. Lors d’une suspension, il risque de subir des pertes sur le plan pédagogique qui occasionneront du travail supplémentaire pour les enseignants. La plupart du temps, les problèmes de comportement qui ont provoqué la suspension ou l’expulsion ne sont que différés. L’exclusion n’est donc pas une solution durable. De plus, ce type de conséquence détériore souvent les relations entre l’école, la famille et l’élève.

Qu’en est-il des pratiques exemplaires? On peut observer que les écoles qui font œuvre d’éducation plutôt que d’exclure repèrent précocement les élèves « à risque » et leur offrent un soutien; veillent à la formation de leurs enseignants et des autres membres de leur personnel; favorisent la collaboration avec les parents;évaluent et modifient au besoin leurs pratiques disciplinaires. Les politiques disciplinaires positivessubstituent d’ailleurs à la suspension classique celle qui se déroule à l’intérieur de l’école; préfèrent lesinterventions préventives à la suspension et renforcent les comportements positifs des élèves.

Les recommandations suivantes sont susceptibles d’être utiles à une école aux prises avec un nombre élevé de suspensions et d’expulsions :

  1. Protéger le temps d’enseignement et d’apprentissage de tous les élèves, y compris celui qui est suspendu. Le droit à l’éducation est valide pour tous les jeunes qui fréquentent nos écoles.
  2. Ne pas faire de « sous-contrat » : l’enseignant qui suspend un élève de son cours doit le rencontrer le plus rapidement possible et, par la suite, téléphoner à ses parents. Il ne doit pas demander à une autre personne de le faire.
  3. Ne pas sanctionner une absence non motivée par une suspension d’une journée. Une conséquence donnée à un élève ne peut avoir comme effet collatéral de créer un retard d’apprentissage ou d’augmenter son risque d’échouer.
  4. Enfin, recourir davantage à la probation intensive comme mesure de rechange. Cette mesure intègre les trois précédentes. Au lieu d’être suspendu à la maison, l’élève du secondaire, par exemple, doit se présenter à l’école, se rendre au local ou au bureau d’un adulte, y déposer ses effets personnels et aller à son premier cours. Il se présente de nouveau à cet adulte à la fin de la période, puis se rend à son deuxième cours, pour ensuite revenir le rencontrer à son bureau, etc. Le dîner se prend également à ce local. Cette probation peut durer une, deux ou trois journées. Elle a l’avantage de préserver le temps d’apprentissage du jeune, de le maintenir à l’école et de le mettre en contact de manière répétée avec un éducateur susceptible de l’aider s’il en manifeste le besoin.